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Sarcoïdose et douleurs

La sarcoïdose est une maladie inflammatoire chronique qui peut toucher de nombreux organes. Elle se caractérise par la formation de granulomes, petits amas de cellules immunitaires, qui perturbent le fonctionnement des organes atteints.

Selon les études, environ 70 % des personnes atteintes de sarcoïdose présentent des douleurs chroniques. Ces douleurs peuvent apparaître dès le début de la maladie et persister même après la disparition des signes visibles d’inflammation. Le plus souvent, il s'agit de douleurs articulaires et musculaires.  

Ces douleurs peuvent avoir plusieurs origines. D’après la classification de l’IASP (Association internationale pour l’étude de la douleur), elles sont regroupées en trois grands types :

  • les douleurs nociceptives,
  • les douleurs neuropathiques,
  • et les douleurs nociplastiques.

Cette classification permet une meilleure compréhension des symptôme et contribue à adapter la prise en charge thérapeutique.

1. Les douleurs nociceptives

Dans la sarcoïdose, les douleurs nociceptives sont les plus fréquentes.

Dans la majorité des cas, elles sont provoquées par l’activation des récepteurs à la douleur (nocicepteurs) sous l’effet des processus inflammatoires induits par la maladie, notamment en lien avec la présence des granulomes.

Dans la sarcoïdose, les douleurs inflammatoires concernent le plus souvent les articulations, en particulier les chevilles, les genoux, les poignets et les coudes. Elles présentent généralement les caractéristiques suivantes :

  • Raideurs articulaires, notamment matinales, durant plus de 30 minutes ;
  • Signes visibles d’inflammation (chaleur, rougeur, gonflement) particulièrement fréquents dans le cadre du syndrome de Löfgren ;
  • Amélioration à la mobilisation, à l’inverse des douleurs mécaniques qui s’aggravent à l’effort ;
  • Réveils nocturnes, survenant en fin de nuit, sans cause mécanique identifiable.

Ces douleurs articulaires sont fréquemment accompagnées de douleurs musculaires (myalgies), parfois associées à une faiblesse musculaire. Selon les cas, ces manifestations pourraient traduire une inflammation musculaire diffuse (myosite) ou résulter d’une hypercalcémie, un trouble métabolique fréquemment associé à la sarcoïdose.

Elles peuvent également être favorisées ou entretenues, même en l’absence d’inflammation locale, par divers facteurs comme :

  • la prise de certains médicaments, notamment les corticoïdes ;
  • une réduction prolongée de l’activité physique, entraînant un déconditionnement et une fonte musculaire ;
  • une hypersensibilisation du système nerveux altérant la modulation de la douleur (voir 3. Les douleurs nociplastiques).

Dans la sarcoïdose, l’inflammation fréquente des poumons et plus rarement celle du cœur, peut également provoquer des douleurs thoraciques. Ces douleurs sont souvent décrites comme une oppression ou une douleur sourde dans la poitrine. Elles peuvent être aggravées par la toux chronique, ainsi que par la compression de certaines structures thoraciques, liée à une augmentation du volume des ganglions médiastinaux (gangliopathie thoracique).

Enfin, on retrouve parfois d’autres types de douleurs inflammatoires, notamment en cas d’atteinte cutanée (par exemple lors d’un érythème noueux) ou d’atteinte osseuse, plus rare, mais possible dans certaines formes de sarcoïdose.

2. Les douleurs neuropathiques

Les douleurs neuropathiques sont une manifestation possible de la sarcoïdose. Elles sont généralement liées à des lésions du système nerveux, provoquées par l’inflammation.

Elles sont souvent décrites comme des :

  • brûlures ou sensations de froid douloureux,
  • décharges électriques, douleurs en coup de poignard ou en broiement.

Ces douleurs s’accompagnent fréquemment de troubles sensitifs, tels que :

  • Paresthésies : sensations anormales non douloureuses (fourmillements, picotements) ;
  • Allodynie : douleur provoquée par un stimulus normalement indolore (contact avec un vêtement, effleurement) ;
  • Hyperalgésie : douleur exagérée en réponse à un stimulus faiblement douloureux.

Dans la majorité des cas, ces douleurs sont liées à une atteinte des petits nerfs périphériques, appelée neuropathie des petites fibres. Elles sont alors souvent localisées, touchant un ou plusieurs territoires nerveux, en particulier aux extrémités des membres (mains, pieds).

Plus rarement, elles résultent d’une atteinte du système nerveux central (moelle épinière ou cerveau), dans le cadre d’une neurosarcoïdose. Ces formes sont plus complexes à diagnostiquer et nécessitent une prise en charge spécialisée.

3. Les douleurs nociplastiques

Même lorsque l’inflammation est bien contrôlée par les traitements, certaines personnes continuent à ressentir des douleurs. Ces douleurs, dites nociplastiques, ne s’expliquent ni par une inflammation active, ni par une atteinte nerveuse objectivable. Elles sont liées à un dysfonctionnement des circuits de modulation de la douleur.

Généralement, les douleurs nociplastiques sont diffuses, touchant les articulations, les muscles, et parfois les os. Elles s’accompagnent fréquemment de :

  • troubles du sommeil,
  • fatigue persistante,
  • difficultés de concentration (souvent décrites comme un "brouillard cérébral"),
  • troubles de l’humeur (anxiété, irritabilité, voire dépression).

Parfois, ces douleurs sont aussi associées à une allodynie : douleur déclenchée par un stimulus normalement indolore, comme le contact des vêtements, le toucher léger ou même un courant d’air.  

5. La prise en charge

La prise en charge de la douleur liée à la sarcoïdose nécessite une approche globale et personnalisée. Elle repose sur deux grands volets :

  • le traitement de fond, pour contrôler l’inflammation,
  • et une prise en charge pluridisciplinaire de la douleur, adaptée à chaque type de douleur.

Dans la sarcoidose, la mise en place d'un traitement de fond repose dépend de la gravité de la maladie, des organes atteints et de son impact sur la qualité de vie : 

  • Surveillance médicale simple : En cas de sarcoidose légère 
  • Corticoïdes (ex. prednisone) : Traitement de première intention en cas de sarcoïdose modérée à sévère.
  • Immunosuppresseurs (méthotrexate, azathioprine…) : Utilisés si la maladie persiste malgré les corticoïdes ou en cas d'effets secondaires.

  • AINS (ibuprofène, diclofénac) : Utiles en cas de douleurs articulaires, musculaires ou thoraciques d’origine inflammatoire. Ils sont souvent associés au paracétamol afin d’en renforcer l’effet antalgique.
  • Tramadol, codéine : Médicaments antalgiques de palier 2, prescrits en cas de douleurs modérées à sévères. Leur efficacité est souvent optimisée par l’association avec du paracétamol.
  • Amitriptyline, duloxétine : Antidépresseurs utilisés à faible dose pour leur action sur la modulation de la douleur, en particulier d’origine neuropathique ou nociplastique.
  • Gabapentine, prégabaline : Antiépileptiques agissant sur la transmission nerveuse de la douleur, indiqués dans le traitement des douleurs neuropathiques ou nociplastiques.
  • Qutenza® (patch à la capsaïcine) et injection toxine botulique A en sous-cutanée : Traitements locaux pouvant être utilisés pour soulager les douleurs neuropathiques localisées, en agissant sur les voies de transmission du signal douloureux.

  • Kinésithérapie & activité physique adaptée : Pour maintenir la mobilité, prévenir la fonte musculaire et réduire certaines douleurs ;
  • TENS (Neurostimulation électrique transcutanée) : Soulage certaines douleurs chroniques, notamment neuropathiques et nociplastiques ; 
  • Soutien psychologique : important en cas de douleur chronique associée à un stress, une anxiété ou une dépression.
  • Méthodes psychocorporelles (sophrologie, relaxation, hypnose…) : entrainant un état d'appaisement globale, pour mieux gérer la douleur au quotidien, 
  • Éducation thérapeutique : Mieux comprendre la sarcoïdose permet de reprendre confiance en soi et de devenir acteur de sa santé.

 


Fiche créée par Francine Taillandier et Camille Racca, médecin formée à la prise en charge de la douleur chronique. Mise à jour le 20-06-2025. 

Sources :