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SED hypermobile (SEDh)

Le SEDh (syndrome d’Ehlers Danlos type hypermobile) est le type le plus fréquent des SED, maladie génétique du tissu conjonctif entraînant une hypermobilité articulaire excessive, une fragilité tissulaire et des douleurs chroniques. Il peut s’accompagner de nombreux autres symptômes tels que des troubles proprioceptifs, digestifs ou dysautonomiques. Le diagnostic est à ce jour uniquement clinique car les gènes impliqués ne sont pas encore identifiés (seul type de SED qui n’a aucune base génétique identifiée à ce jour). Cela entraîne une errance médicale longue, pouvant aller de 10 à 30 ans (voire plus).

1. Quels symptômes entraine-t-il ?

Les symptômes principaux sont une hypermobilité articulaire et une hyperlaxité entraînant (sub)luxations et entorses, une fragilité tissulaire et des douleurs chroniques.

Il existe de nombreuses comorbidités chez les personnes atteintes de SEDh telles que :

  • des troubles allergiques et/ou immunitaire : le syndrome d'activation mastocytaire (SAMA), les allergies, les troubles auto-immuns (lupus, thyroïdite d’Hashimoto,…)
  • des troubles dysautonomiques comme le syndrome de tachycardie orthopostural (STOP ; POTS en anglais), l’hypotension orthostatique, le syndrome de Raynaud, les troubles de la thermorégulation/l’intolérance à la chaleur ou au froid.
  • des troubles digestifs : troubles du transit, gastroparésie, dysmotilité gastro-intestinale, reflux gastro-œsophagien, ulcères, maladie cœliaque, maladie de Crohn, syndrome de l’intestin irritable (SII), colonisation bactérienne de l’intestin (SIBO).
  • des troubles gynécologiques : dysménorrhées sévères (règles douloureuses), endométriose, adénomyose, prolapsus, dyspareunies (rapports sexuels douloureux), syndrome des ovaires polykystiques (SOPK), fausses couches ou travail prématuré, dysfonction pelvienne, …
  • des troubles urinaires : cystite interstitielle (syndrome de la vessie douloureuse), infections urinaires à répétition, pollakiurie (envie fréquente d’uriner), incontinence, prolapsus de la vessie (cystocèle),…
  • des troubles neuro développementaux (neuroatypies) et psychiatriques : troubles du spectre de l’autisme, trouble de l’attention avec ou sans hyperactivité (TDAH), anxiété, hypersensibilité, dépression, troubles de l’attachement,…
  • des troubles du sommeil : apnée, insomnie, hypersomnie, sommeil non réparateur,…
  • des troubles respiratoires : dyspnée à l’effort, asthme, hyperventilation,…
  • des troubles neurologiques : neuropathie des petites fibres, migraines, algie vasculaire de la face, encéphalite myalgique (syndrome de fatigue chronique (EM/SFC)), troubles de l’équilibre/dysproprioception.
  • des troubles ophtalmologiques : sécheresse oculaire, myopie, astigmatisme, strabisme, fatigue visuelle.
  • des troubles cardio-vasculaires : prolapsus de la valve mitrale, dilatation de la racine aortique, insuffisance veineuse, varices précoces, troubles du rythme cardiaque/arythmies (palpitations, extrasystoles, tachycardie), hypotension chronique et/ou hypertension réactionnelle.
  • des troubles musculo squelettiques : tendinites, bursites, douleurs chroniques, ostéoporose précoce, hernies.

2. Comment est-il diagnostiqué ?

Le diagnostic du SEDh est uniquement clinique. Il repose sur une liste de critères définis par la classification de New York de 2017. 

Les critères 1, 2 et 3 ci-dessous doivent tous être validés.
CRITERE 1 - Hypermobilité articulaire généralisée

Un item sélectionné parmi les suivants (score de Beighton) :

  • ≥ 6 enfants/adolescents pré-pubères
  • ≥ 5 hommes et femmes pubères jusqu'à 50 ans
  • ≥ 4 hommes et femmes au delà de 50 ans


Si le Score de Beighton est un point en dessous du seuil spécifique à l'âge et au sexe, au moins deux des items suivants doivent aussi être sélectionnés pour valider le critère :

  • Pouvez-vous (ou avez-vous déjà pu) placer vos mains à plat sur le sol sans plier vos genoux ?
  • Pouvez-vous (ou avez-vous déjà pu) plier votre pouce pour toucher votre avant-bras ?
  • Lorsque vous étiez enfant, amusiez-vous vos amis en contorsionnant votre corps dans des positions étranges ou pouviez-vous faire le grand écart ?
  • Lorsque vous étiez enfant ou adolescent, avez-vous eu votre épaule ou votre rotule luxée en une ou plusieurs occasions ?
  • Vous considérez-vous comme « désarticulé » ?


CRITERE 2 – Au moins deux des caractéristiques suivantes (A, B, ou C) doivent être présentes

Caractéristiques A (cinq doivent être présents/12)

  • Peau inhabituellement douce ou veloutée
  • Légère hyperextensibilité cutanée
  • Larges vergetures inexpliquées sur le dos, les cuisses, la poitrine et/ou l'abdomen chez les adolescents, les hommes, les filles pré-pubères sans antécédent de prise ou perte significative de masse graisseuse ou de poids
  • Papules piézogéniques bilatérales des talons
  • Hernie(s) abdominale(s) récurrente(s) ou multiple(s)
  • Cicatrisation atrophique à au moins deux endroits, sans aspect vraiment papyracées ni dépôt d’hémosidérine comme on peut le voir dans le SEDc
  • Prolapsus pelvien, rectal et/ou utérin chez un enfant, un homme ou une femme nullipare sans antécédent d'obésité morbide ou autre condition médicale connue y prédisposant
  • Chevauchement dentaire et palais haut ou étroit
  • Arachnodactylie, telle que définie ci-après (un ou deux de ces signes est nécessaire) :
    • signe du poignet (signe de Walker) bilatéral
    • signe du pouce (signe de Steinberg) bilatéral
  • Ratio envergure sur taille ≥ 1,05
  • Prolapsus de la valve mitrale (PVM) léger ou plus marqué, basé sur des critères écho-cardiographiques stricts
  • Dilatation de la racine aortique avec un Z-score > +2

Caractéristique B

  • Histoire familiale évocatrice avec au moins un proche au premier degré validant les critères actuels de SEDh

Caractéristiques C (au moins un doit être présent)

  • Douleurs musculo-squelettiques d’au moins deux membres, récurrentes quotidiennement pendant plus de 3 mois
  • Douleurs diffuses, chroniques pendant plus de 3 mois
  • Luxations récurrentes des articulations ou franche instabilité articulaire, en l'absence de traumatisme


CRITERE 3 – Tous les prérequis suivants DOIVENT être validés

  • Absence de fragilité cutanée inhabituelle, qui devrait conduire à évoquer d'autres types de SED.
  • Exclusion d'autres pathologies du tissu conjonctif héritées et acquises, incluant les pathologies autoimmunes rhumatologiques. Chez les patients avec une pathologie du tissu conjonctif acquise (ex: Lupus, polyarthrite rhumatoïde, etc.), un diagnostic additionnel de SEDh nécessite la validation des caractéristiques A et B du Critère 2. Les caractéristiques C du Critère 2 (douleur chronique et/ou instabilité) ne peuvent pas être prise en compte pour diagnostiquer le SEDh dans cette situation.
  • Exclusion des diagnostics différentiels associés à une hypermobilité articulaire en raison d'une hypotonie et/ou d’une laxité du tissu conjonctif. Ces diagnostics différentiels incluent notamment (mais pas seulement) les pathologies neuromusculaires (ex : myopathie de Bethlem), d'autres pathologies héréditaires du tissu conjonctif (ex : autres types de SED, syndrome de Loeys-Dietz, syndrome de Marfan), et des dysplasies squelettiques (ex : ostéogénèse imparfaite). L'exclusion de ces diagnostics différentiels est basée sur l’histoire de la maladie, l'examen physique, et/ou la biologie moléculaire selon les cas.

3. Qui peut être concerné ?

La prévalence exacte n’est pas connue mais elle est estimée à environ 1/5000 (soit 0,02%).

Selon la banque nationale de donnés maladies rares (BNDMR), le nombre de cas diagnostiqués de SEDh en France serait : 2901. Il est important de préciser que ce nombre est très largement sous-estimé car tous les cas diagnostiqués ne sont pas forcément recensés dans la BNDMR. De plus, le SEDh de manière générale est trop peu diagnostiqué du fait de la complexité du diagnostic qui est uniquement clinique et d’exclusion, ainsi que des diagnostics différentiels nombreux.

4. Quelles en sont les causes ?

Le gène causant le SEDh est actuellement inconnu. Les recherches récentes suggèrent qu’une combinaison de gènes serait à l’origine de ce type de SED. Vous retrouverez un lien en bas de page sur la liste des études en cours, notamment l’étude HEDGE de la Ehlers Danlos Society qui a obtenu un financement d’un million de dollars pour analyser les échantillons de sang de nombreux patients atteints du SED. Les premiers résultats suggèrent qu’un fragment de fibronectine de 52kDa serait présent dans le plasma de toutes  les personnes atteintes du SEDh et HSD (troubles du spectre de l’hypermobilité), et absent chez les autres types de SED ou autres pathologies inflammatoires. Il pourrait, si les prochains résultats sont confirmés à plus grande échelle, servir de biomarqueur pour élaborer un test diagnostique (mais au stade actuel des recherches, cela est encore très prématuré).

Le mode de transmission semble suivre un modèle autosomique dominant. Autosomique signifie qu'il peut être transmis et hérité indifféremment par les hommes et les femmes. Dominant signifie qu’une seule copie du/des gène(s) portant la/les mutation(s) suffi(sen)t pour être atteint de la maladie.

Par conséquent, concernant la transmission, les personnes atteintes du SEDh ont 50% de risque de transmettre la maladie à chacun de leurs enfants ; car nous héritons d’une copie de chaque gène de chacun de nos parents (pour obtenir les deux copies).

5. Quel en est la prise en charge ?

La prise en charge consiste à stabiliser ou ralentir l’évolution de la maladie, prévenir ses complications et améliorer la qualité de vie des patients pour conserver la meilleure autonomie possible, le plus longtemps possible. Elle est donc symptomatique et comporte également des examens préventifs notamment un bilan cardiaque avec ECG et echodoppler artériel des troncs supra aortiques (ou angio-IRM) tous les 5 ans minimum.

Les recommandations de prise en charge sont :

  • sur le plan ostéo articulaire : vêtements compressifs, kinésithérapie, appareillage (petits et grands appareillages et consultations MPR, coussins, fauteuil roulant etc), orthèses/attelles, semelles orthopédiques,… Chirurgies en dernier recours.
  • programmes d’ETP (éducation thérapeutique du patient), programmes de réadaptation à l’effort encadrés par des spécialistes, activité physique adaptée (APA).
  • sur le plan de la douleur : médication, TENS, algologie interventionnelle (infiltrations radioguidées (cortisone, acide hyaluronique, PRP), neuromodulation par radiofréquence, injections de toxine botulique, rhizolyse, etc), Qutenza, injections sous cutanée de lidocaïne (ou dérivés tels que ropivacaïne ou carbocaïne), mésothérapie.
  • sur le plan de la fatigue : bilan neuropsychologique, orthophonie. Appareillage en cas d’apnée du sommeil. Les carences sont à surveiller (surtout le fer chez les femmes) et la supplémentation en vitamine D est systématique.
  • sur le plan psychologique : un suivi avec un-e psychologue est recommandé car le SEDh étant une maladie chronique incurable et imprévisible, elle a des répercussions non négligeables sur la santé mentale.
  • sur le plan des troubles gastro-intestinaux : adaptation du régime alimentaire (type anti-inflammatoire, faible en FODMAP,…), médication.
  • sur le plan respiratoire : l’oxygénothérapie, la PPC si apnée du sommeil.
  • sur le plan bucco-dentaire : soins dentaires réguliers, rééducation de l’appareil temporel mandibulaire et gouttières si nécessaire.
  • sur le plan ORL : orthophonie en cas de dysphagie ou dysphonie, appareillage auditif si besoin.
  • sur le plan visuel : lunettes, rééducation orthoptique si besoin, collyres en cas de sécheresse oculaire.
  • sur le plan gynécologique : rééducation périnéale, hormonothérapie (de préférence oestro-progestatifs car les implants et DIU (stérilets) sont mal tolérés). En cas de projet de grossesse, une consultation pré-conceptionnelle en conseil génétique peut être utile. En cas de grossesse, un suivi mensuel est recommandé jusqu’à 34 SA puis toutes les semaines ou 15 jours. Des précautions particulières doivent être prises et tant les soignants que les patients doivent en être informés.

6. Quelles sont les précautions à prendre ?

Il est recommandé d’éviter les activités de compétition telles que la gymnastique, le soulèvement répétitif de charges lourdes et les sports qui causent un stress articulaire important ne sont pas recommandées. De même, il faut éviter les sports de contact et de pivot. Néanmoins il est important de noter que le maintien d’une activité physique adaptée régulière ainsi que la kinésithérapie sont à maintenir autant que possible (exercices à faible impact, isométriques et excentriques, proprioceptifs et posturaux).

Concernant les chirurgies, elles doivent être faites après avoir épuisé toutes les techniques non chirurgicales, en dernier recours, et par des chirurgiens ayant de l’expérience chez des patients SEDh. Des recommandations de techniques chirurgicales en fonction de l’articulation concernée sont présentes dans le PNDS. Les points de suture doivent être réalisés avec du fil non résorbable, sans tension, être laissés en place plus longtemps et retirés progressivement.

Concernant la procréation, des recommandations sont détaillées dans la partie 7.7 du PNDS (pages 40 à 43).

 


Fiche rédigée par Francine et relue par Mylène B. Mise en ligne le 10-06-2025.

Sources :